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Objet à compléter – EMI
EMI

Expérimentation, Méthodologie et Innovation

Objet à compléter

Inviter l’usager à participer aux processus de conception et de production est une intention souvent formulée par les designers. Cette approche offre la possibilité à l’usager de traiter des problématiques au cœur de ses usages et d’augmenter le produit  d’une logique de sur-mesure. De plus, elle part d’une volonté de confronter l’usager à une dimension créative et à lui faire appréhender les différentes complexités qui incombent un produit.  Dans le domaine marketing, la théorie scientifique est très riche et développé sur ce sujet. Elle a généré de vrais leviers sur ce terrain pour activer les dialogues entre consommateur et entreprise.

Le projet « Objet à compléter » cherche à proposer une vision nouvelle de la production industrielle qui prend en compte les ressources de l’usager ou les contextes d’utilisation du produit. Il s’agirait de proposer des objets incomplets, dont la composante manquante serait aisément disponible dans le milieu de vie de l’usager. Cela aurait un double objectif. Le premier d’éviter des filières de productions additionnels qui ne se destinent qu’aux sous-éléments d’un objet (accessoires, poignées, boutons, coques, pièces techniques) et donc éviter les montages, transport et mains d’œuvres qui les génèrent. Le second d’offrir à l’usager une participation à l’élaboration et l’achèvement du produit, donc un plus grand attachement tant technique qu’émotionnelle, et une possibilité de personnalisation. Enfin, il s’agirait de proposer un nouveau mode de consommation où tout produit ne sera pas vendus comme un « prêt-à-l’emploie » ou un « prêt-à-porter ». Ce circuit demanderait un engagement de la part de l’usager, qui refuserait l’abandon de l’objet au moindre problème. La boite noire que pouvait constituer les électro-ménagers sera. Une façon de contrer les logiques d’obsolescences.

Cette logique d’anticipation des ressources dans les contextes d’utilisation des objets demande une observation lucide du milieu dès la phase de conception de l’objet.

Dans l’univers domestique, on peut retrouver un nombre varié d’objets qui peuvent servir de contenant et qui pourrait naviguer aisément d’un usage à un autre. Cette potentialité qu’ont les objets à devenir autres choses si besoin, à devenir des objets transversaux, demande une certaine standardisation, et donc une norme pour offrir leur opérabilité.

Ici, est imaginé un bloc aspirant pouvant se greffer à n’importe quel seau ménager. Cette disposition évite l’incessante production d’une nouvelle coque au produit et profite du volume du seau pour récupérer la poussière. Une fois la tâche terminée, le seau s’affranchit du bloc aspirant et peut être utilisé pour d’autre besoin.

co-participation, co-production, co-création

Les dynamiques de co-participation, co-production, co-création sont un ensemble de dénominations décrivant ces stratégies marketing développées à l’origine par des justifications économiques. Le degré de participation active ou non du consommateur a pour but d’améliorer la productivité d’une entreprise par différents points d’entrée dans les phases de production de ses offres. Simplement en transférant des taches et travaux effectués par des salariés par le consommateur lui-même, afin de le faire bénéficier d’un gain de temps et de lui permettre d’exécuter l’action quand il le souhaite. Les premières formes d’une participation sont celle du self-service, de la personnalisation de masse, ou de l’acte d’achat en borne (self-scanning). La collaboration du consommateur est cependant un véritable moteur dans l’intérêt marketing puisqu’elle constitue une majoration du service global de l’entreprise en approfondissant les interactions possible entre l’entreprise et le consommateur. Le développement du numérique dans l’univers marchand  a ouvert un vaste terrain de rencontre possible, au travers des interfaces digitalisés, des réseaux sociaux, de l’automatisation, des plateformes internet jusqu’aux objets connectés pour fidéliser le consommateur au cœur de son quotidien dans ses tâches pour et par l’entreprise. Ce nouvel espace, maximisant la présence de l’image de marque, a multiplié les occasions d’activités les potentiels du consommateur en matière d’innovations pour l’entreprise, d’expression du consommateur sur ses désirs, de partage d’expériences et permet de faire émerger des communautés autour de celle-ci.

Ainsi, on retrouve différents stades de participation du consommateur. Décrit par Marie-Anne Dujarier, des cadres sont établies par les entreprises pour disposer du service et sont classifié comme suit : l’autoproduction dirigée, qui définit des tâches simples faites auparavant par le personnel réalisé à l’aide d’un matériel dédié, pour le consommateur lui-même. La coproduction collaborative, dans laquelle est soutiré un certain nombre d’informations et d’idée du consommateur à son insu via les plateformes de marques et les communautés. Enfin, un travail d’organisation peut être mené directement par certain client pour présenter leur vision et rapporté des éventuelles anomalies observées depuis leur point de vue.

Bernard Cova, Pascale Ezan et Gregorio Fuschillo ont distingué plusieurs formes d’autoproduction. L’autoproduction dirigée voit ses applications élargies dans de nombreux secteurs d’activités avec un panel de tâches bien plus vastes. Elle nécessite un « apprentissage technique et social pour faire du consommateur un acteur compétent et productif » et favorise plutôt l’individualisation des activités. L’autoproduction accompagnée est une dynamique sociale qui donne naissance à des lieux collectifs pour apprendre à faire soi-même avec des valeurs d’autonomisation et de passion. Elle se base sur la communauté née autour de la marque. L’autoproduction facilité, est un cadre qui met à disposition une plateforme pour de la production de consommateur à consommateur (CtoC) dans une activité précise déterminée de façon à faciliter les échanges et services. C’est le modèle de Leboncoin, BlablaCar, Ebay, Airbnb. Enfin l’autoproduction émancipée, fonctionne plutôt sur un registre de détournement dans lequel le consommateur augmente le produit de la marque par sa propre créativité et le transmet ou le commercialise en s’appropriant les valeurs de la marque. Elle s’illustre à travers des sites comme Ikeahackers.net ou Brickfair.com pour les légos. C’est une dynamique qui s’appuie sur l’image de marque et une communauté de passionné. Elle est cependant produite par la nature « ouverte » des produits de la marque et ne peut être canalisé.

La participation du consommateur peut intervenir à différentes étapes clés du processus marketing en comptant la pré-conception, la conception produit, la valeur marchande, la communication, la distribution, le SAV. Lorsqu’elles concernent le processus marketing lui-même, il devient collaboratif selon Dujarier ou participatif selon Divard. Dans la phase de pré-conception, il peut s’agir d’actes de la part de l’entreprise tendant à extraire de l’information à sa clientèle ou future clientèle, au moyen de réponse à des enquêtes, afin de déterminer les attentes et préférences et in fine d’adapter ses offres. Le consommateur n’a pourtant pas toujours conscience d’être inclus dans le processus marketing. Dans la phase de conception, deux dynamiques sont décrites, celle de la co-innovation et de la customisation de masse. La première est expliqué par Emmanuelle le Nagard et Fanny Reniou sous trois tendances, celle qui demande requête auprès de « lead-users » sur des propositions de projet, une autre qui fait intervenir l’ensemble des consommateurs tout au long du processus d’innovation.

Les technologies par le numérique et les procédés de fabrication additive ont fait émerger des postures d’autoproductions de l’utilisateur. En effet, l’arrivée de gamme d’imprimantes 3D tout public a ouvert une brèche dans le cycle de production industrielle et a permis à l’utilisateur d’intervenir à certain moment clés de la production, voire de s’inscrire dans les phases de conception. C’est même l’écosystème digital construit autour de cette technologie  – conception assistée par ordinateur, paramétrage de certaines données du produit, numérisation des plans et fichier de production – qui a permis d’éclater un mode opératoire plutôt linéaire dans la production industrielle et de distribuer différents moments d’une création, à différents rôles (designer, ingénieur, producteur, diffuseur, utilisateur) dans différents lieux au même moment. Cet écosystème a permis une fluidité des pratiques amplifié par le phénomène d’ubiquité que génère Internet. La souplesse offerte par le processus des imprimantes 3D posent aussi la question du sur-mesure et de l’adaptabilité au contexte ou au destinataire.  En adaptant les paramètres dès la conception des modèles, il est possible de coller au plus proche des besoins d’un utilisateur et ainsi d’optimiser le matériau. Comme le propose Ralf Holleis avec son vélo VRZ 2, en partant des données biométriques de l’utilisateur pour générer des nœuds d’assemblages en titane, seul la matière nécessaire est utilisée pour s’adapter à la morphologie du client. C’est une approche qui s’empare de l’ingénierie et des process de conception paramétrique. Le paramétrage peut aussi permettre à l’utilisateur de participer à l’esthétique de l’objet en le personnalisant comme le propose Chair#71 de François Brument et Ammar Eloueini en mettant à disposition deux sliders qui viennent stimuler des variables dans la trame de la chaise et finalement créer une pièce unique, propre à son destinataire. Aussi une logique consiste à ce que l’utilisateur cumule une auto-production et des produits de consommation courante pour créer un objet nouveau, potentiellement sur-mesure. C’est le cas des diverses propositions de nœud d’assemblages pour le mobilier comme Keystones de Minale Maeda, Print to buils de Ollé Gellert ou encore Droles d’oiseaux de Fritsch-Durisotti qui consiste à imprimer par soi-même des pièces d’assemblages et de les combiner à des semi-produits bois (contreplaqué, tasseaux ou tourillons)  pour bricoler son meuble. Cette autoproduction peut même permettre d’augmenter un produit du commerce et de faire varier son usage comme 3-pring product du studio japonais Takt qui proposent d’imprimer des compléments d’objets pour les produits de la marque MUJI et permet par exemple de transformer une caisse de rangement en lampe. On repensera à la culture du détournement et aux diverses Hacks des produits Ikea. Enfin, il est aussi proposé d’accessoiriser des équipements basiques sur le marché en imprimant des pièces. C’est le cas de la collection d’accessoires metaformTools proposée par le studio 7.5 qui permet de compléter un bureau manufacturé par l’éditeur Herman miller ou des Bike accessories de Michael mueller qui viennent faire profiter tous types de vélos de petit supplément comme un porte bouteille ou une poignée de transport.

Certaines évolutions culturelles ont participés à muscler le regard créatif de l’usager et à développer son potentiel à innover dans des temps difficiles. La gambiarra au Brésil, le système D en France, le Jugaad en Inde, le rikimbili à Cuba ont participer à façonner l’esprit de l’astuce et de la débrouillardise dans les populations concernées.

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